vendredi 23 mai 2014

Bulletin Vigilance info n° 63: l'extrême droite européenne

                   
                                          L'extrême droite européenne,
            serviteur de l'oligarchie financière
     (Italie - Autriche - Norvège - Hollande)

Les partis européens d'extrême droite partagent une série de valeurs culminant dans la "dénonciation" du "système" et fustigeant les "élites" - jugés corrompus - qui investissent aussi bien les partis politiques, l'Assemblée nationale et le sénat.

La dénonciation des structures supranationales (la Banque Centrale Européenne, la Commission Européenne, le Fonds Monétaire International, etc.), ainsi que des immigrés et des citoyens n'étant pas de "souche", fait partie de la rhétorique habituelle de l'extrême droite.
C'est ainsi que l'extrême droite ethnicise les problèmes sociaux. Car l'ethnie principale n'est "ni de gauche, ni de droite". Les problèmes sont créés par les "autres", transformés en boucs émissaires.

En France, le Front National (FN), qualifie la République de "gueuse" ou de "Ripoublique" qui empêche l'expression de la volonté populaire. Face au "système", l'extrême droite française exprime sa "confiance absolue dans le peuple". Pour elle "le peuple est naturellement de bon sens et pur"! Inutile de dire que nous n'avons pas la même conception du peuple.
Qu'en est-il des autres pays européens?

En Italie, le vide créé par la chute électorale de l'"Alliance du Nord", néofasciste "repentie" et alliée de Berlusconi, a été rempli par une espèce de comique, Beppe Grillo - chef du Mouvement 5 étoiles(M5S) -. C'est l'extrême droite pure et dure. Beppe Grillo se déclare en guerre contre des "ennemis intérieurs et extérieurs" tels que la presse, la Commission européenne, le Fonds monétaire international, la Banque centrale européenne et tous les politiciens.(1)

La pensée politique de Beppe Grillo et de son inspirateur et gourou, Gianroberto Casaleggio, a été révélée dans un livre d'entretien (Il Grillo canta sempre al tramonto, non traduit) où s'exprime leur nostalgie de l'Italie du Moyen Âge et de la Renaissance.

Intervenant dans le débat sur la "citoyenneté italienne", Beppe Grillo refuse, comme le souhaite la ministre de l'intégration, de substituer le droit du sol au droit du sang, un repli identitaire, qui va de pair avec l'euro, la cause de tous les maux de l'Italie.  Beppe Grillo propose de sortir de l'euro, suite à un référendum.(2)

Comme l'extrême droite française, Beppe Grillo attaque les corps intermédiaires, tels que les syndicats, les partis politiques. Le remplacement des élus se fera par la "vox electronica", la Toile. Le "non- leader du no- parti" évoque des "valeurs communes" avec l'officine néofasciste CasaPoundItalia.(2)


Une saisissante ressemblance entre le FN et le M5S

Le FN s'adresse "aux petits, aux sans-grades, aux oubliés", M5S s'adresse à toutes "les victimes et les dégoûtés" de la triples crise italienne.(3)

L'Italie connait, en outre, un mouvement de protestation du type "Bonnets rouges", hétéroclite et incontrôlable qui s'en prend "à la caste" - comprenant aussi bien l'Union européenne, la classe politique, les syndicats et même les libraires -. C'est le mouvement de révolte des Forconi ("les fourchettes") qui regroupe pêle-mêle les camionneurs, les chômeurs, les supporteurs de foot.(4)

Andrea Zunino, l'un des porte-parole des Forconi, prêt à rencontrer Grillo, accuse les "banquiers juifs" d'être responsables des crises économiques en Italie. Selon lui "L'Italie est l'esclave des banquiers juifs".(4)

Affaiblie, la "Ligue du Nord" s'est radicalisée à son tour, revenant aux sources du mouvement: xénophobie, antieuropéisme et indépendance, sous l'égide de son nouveau chef Matteo Salvini. Ce dernier a déclaré en 2009 être en faveur de wagons séparés pour les Milanais de souche dans le métro de la capitale lombarde, dont il est originaire.(5)

Les résultats de l'alliance Berlusconi- Ligue du Nord sont là:" L'Italie sort exsangue et déprimée de vingt ans de berlusconisme"! (3)

L'Autriche est le deuxième pays le plus riche de l'Union européenne après le Luxembourg. Pourtant, le "Parti autrichien de la liberté" (FPÖ), parti d'extrême droite a recueilli 21,4% des suffrages aux législatives de 2013, en hausse de près de quatre points par rapport à 2008, derrière les sociaux démocrates du SPÖ (27,1%).(6) Le FPÖ a mené campagne contre Bruxelles, les demandeurs d'asile et les immigrés.(7)

Pour Patrick Moreau, spécialiste de l'extrême droite, plus rien ne s'oppose plus à ce que le FPÖ et le FN concurrencent durablement les partis de gouvernement. "Ils ont une stratégie en tout point semblable."

Comparaison entre FN et FPÖ: "Leur curseur idéologique...repose sur trois notions: d'abord l'autoritarisme, parce qu'il faut faire peur...ensuite la critique de l'islam, de l'Europe et de l'euro, bref de la mondialisation."(6)
Penchant nazi du FPÖ
Barbara Rosenkranz, candidate du FPÖ à la présidentielle, entretient de l'ambigüité avec le nazisme. Chaque année au mois de juin, elle organise dans son jardin une "fête du solstice". Son mari est connu pour ses liens avec la mouvance néonazie. Il édite la revue Fakten, toujours prête à dénoncer "les Turcs, les Tchétchènes, les Asiatiques, les tziganes et les nègres" ou "les poncifs éculés des prétendus crimes de la Wehrmacht et des horreurs des camps". Elle critique le féminisme et la théorie du "genre", qu'elle a résumé dans un pamphlet sous-titré "Vers des être humains asexués".(8)

En Norvège, l'extrême droite organisée est représentée par le parti du progrès (FrP). Fondé en 1973, une année après le Front national, FrP a prôné l'anti-immigration dans les années 1980. Sa patronne, Siv Jensen, dénonce "l'islamisation rampante" du pays. Pour Olivier Truc, envoyé spécial du quotidien Le Monde en Norvège, "le FrP sent le soufre (...) anti-impôt, anti-bureaucratique, anti-social-démocrate, il est devenu anti-immigré (...) son discours anti-islam et anti-immigration dérange."(10)

Sur l'un de ses tracts, FrP stigmatise les étrangers "ce délinquant est étranger".(9)
Il faut rappeler que Anders Behring Breivik, l'auteur du double attentat du 22 juillet 2011, qui a fait 77 morts, a été membre du FrP pendant dix ans.(9) Hier antisystème, FrP fait actuellement partie intégrante du jeu politique.

Aux législatives du 09 septembre 2013, FrP devient le troisième parti du pays et participe à la formation du nouveau gouvernement en décrochant les postes clés des finances, du pétrole, de la justice et des transports! Des postes qui lui permettent de traquer légalement les immigrés, de supprimer la subvention aux associations, à la culture et au service public en général, de raboter les soins de santé, les indemnités de chômage, entre autres.

Aux Pays-Bas, la cinquième économie de la zone euro, le parti d'extrême droite se nomme "Parti pour la Liberté" (PVV), dirigé par Geert Wilders. PVV triple le nombre de ses députés aux législatives partielles de juin 2010, obtenant 24 sièges de députés et devenant ainsi la troisième force politique du pays. Le gouvernement minoritaire de Mark Rutte conclut une alliance avec l'extrême droite au moment de son entrée en fonction en octobre 2010: en échange du soutien du PVV à un vaste programme de coupes budgétaires!(11)

L'extrême droite aux Pays - Bas [et partout en Europe] est devenue un élément déterminant entre les mains de l'oligarchie financière, adepte des coupes budgétaires et de la casse du service public. Ainsi, lors de son discours traditionnel, le roi des Pays - Bas, Willem - Alexandre a déclaré : "la fin de l'Etat-providence." Selon le ministre des finances: "Six milliards d'euros de coupes supplémentaires [sont] prévues, notamment dans les soins de santé et la sécurité sociale"(12)

En l'absence d'un sursaut des Français pour défendre le service public, nous risquons de revivre un scénario identique en France!
                                                                                                                                                           A.R.
(1) Philippe Ridet - Le Monde du 26 -27 janvier 2014.
(2) Philippe Ridet - Le Monde du 13-14 octobre 2013.
(3) Philippe Ridet - Le Monde du 12 novembre 2014.
(4) Eric Jozsef - Libération du 17 décembre 2013.
(5) Philippe Ridet - Le Monde du 24 janvier 2014.
(6) Libération du 1er octobre 2013.
(7) Le Monde du 1er octobre 2013.
(8) Joëlle Stolz - Le Monde du 09 mars 2010.
(9) Le Monde magazine du 21 septembre 2013.
(10) Le Monde du 04 septembre 2013.
(11) Par Europe 1.fr avec AFP - publié le 24 avril 2012. Lis à jour le 24 avril 2012.
(12) Libération du 18 septembre 2013.

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